Juliette DROUET
« Il me semble qu’une bonne petite calotte me remettrait en scelle. »
DROUET (Juliette Gauvain, dite Juliette). 1806-1883. Actrice, liée à Victor Hugo, épistolière.
Une lettre autographe signée « Juliette », adressée à Victor HUGO. Sans lieu, 19 mars mercredi soir 8 h 1/2.
4 pages sur un bi-feuillet in-octavo, format : L. : 19,7 cm ; 12,9 cm
Une admirable lettre par son intensité passionnelle dans laquelle la fameuse amante de Victor Hugo réclame « une bonne petite calotte » qui la remettrait en scelle et la rendrait bien heureuse.
Transcription dactylographique :
« 19 mars mercredi soir 8 h 1/2
Depuis que tu es parti, mon cher petit homme, on dirait que tous les orages du bon dieu sont déchaînés tant le vent souffle et secoue mes fenêtres et mes portes. Heureusement que je te sais à l’abri chez toi auprès de ta famille et que je n’ai pas à m’inquiéter de toutes les vagabondes [prostituées] qui s’ébattent sur le nez des passants. Aussi, je vais aller me coucher très tranquillement dans l’espoir de dormir enfin quelques heures. Je me sens un grand mieux depuis une heure. J’espère que cela ne fera qu’augmenter avec le repos de la nuit. Bonsoir, cher bien aimé, ne te couche pas trop tard de ton côté. Il me semble que je dormirai d’autant mieux que tu dormiras toi-même. C’est dans cette pensée que je vais me coucher. Nous verrons si j’aurai enfin un bon sommeil magnétique et sans affreux cauchemars comme tous ceux que j’ai eu jusqu’à présent avec mes affreux roupillages sans repos. Il me semble qu’une bonne petite calotte me remettrait en scelle. Tâchez donc de me la donner très prochainement vous me rendrez bien heureuse et vous me guérirez de tous mes maux. Je vous en prie, mon petit homme, au nom de ma santé, au nom de mon bonheur, au nom de tout ce qui peut vous attendrir et vous décider. Jusqu’à là je souffre et je vous adore. Juliette »
Codicologie :
Écriture commune, épistolaire. Une cursive peu soignée et assez irrégulière, à l’encre brune sur un papier chiffon vergé écru à grammage faible, sans filigrane entier ou divisé. L’écriture est inclinée à droite, en caractères fort déliés, difficilement lisibles au premier coup d’œil et qui peuvent compliquer la lecture. Un bon état général.
L’amour-passion
Pendant cinquante ans, Juliette Drouet a écrit à Victor Hugo deux fois par jour. La dernière lettre écrite de sa plume, le 1er janvier 1883, se terminait ainsi : « … je ne sais pas où je serai l’année prochaine à pareille époque, mais je suis heureuse et fière de te signer un certificat de vie pour celle-ci par ce seul mot : je t’aime. »
Elle avait 77 ans et lui 81. Depuis 1833, cette inlassable épistolière avait écrit environ 18 000 lettres autobiographiques sur ce tons-là.