BAUDELAIRE. Articles justificatifs

Les articles justificatifs destinés à ses juges.

Baudelaire articles

BAUDELAIRE (Charles). Articles justificatifs pour Charles Baudelaire auteur des Fleurs Mal

Sans lieu, sans nom d’éditeur [Paris, Imprimerie Mme Vve Dondey-Dupré, rue Saint-Louis, 46, au Marais], sans date [août 1857].

In-4° (H. 272 mm. ; L. 215 mm.) de 33 pp.

Une brochure non ébarbée, à deux points de couture. La couverture imprimée tient lieu de page de titre. 

Sur la couverture, cet envoi autographe signé :

« à Monsieur Ancelle,

Ch. Baudelaire »


Remarques détachées.

Dans la marge du haut, on lit, à l'angle supérieur gauche, une note marginale à la plume, encre brune, sur une ligne, de Narcisse Ancelle : « 1857 » puis « Procès » et ensuite le chiffre « 7 » souligné d’un trait. Cela correspond généralement au système de cotation des pièces dans les affaires judiciaires.

La couverture muette inférieure de cette plaquette [voir photographie infra] a perdu dans sa verticalité, anciennement, sans gravité, la moitié du feuillet. Signalons des notes au crayon graphite de Narcisse Ancelle, contemporaines de la brochure, sur la moitié restante. Ces derniers mots sont à peine lisibles, et nous ne les donnons que sous réserves : milieu nouveau ; ressent le besoin [ici le mot est non lu] ; par d’obscénité non ; l’obscénité ; parlé avec un ; victime non ; com[me] en juge ; [ici le mot est non lu] ; représenté le jour suivant.  

Vendu


ÉDITION ORIGINALE HORS COMMERCE, TRÈS RARE, TIRÉE À 50 EXEMPLAIRES.

Il n’est pas, ici, hyperbolique de qualifier cette plaquette d'émouvante relique littéraire, – relique d’une ample qualité et d’un pouvoir d’évocation incomparables !

Nota : Le catalogue BnF, Charles Baudelaire, Exposition organisée pour le centenaire des Fleurs du Mal, Paris, 1957, annonce : « tiré à 100 exemplaires ».

Cette précieuse brochure, fragile du fait de sa conception, n'a pas résisté à l'usure temps. 

À ce jour, nous n’avons recensé précisément que 5 exemplaires : BnF, Gallica (sans envoi) ;  Bibliothèque de l’Institut, cote Louvenjoul M6602 bis, (envoi à M. Brucker, Raymond Brucker, homme de lettres, reçoit les placards via son ami Barbey d’Aurevilly) ; British Library, Google_Books (sans envoi) ; Maurice Ancelle (envoi à Narcisse Ancelle) ; Bibliothèque Fernand Vandérem, Première partie, n° 100, p. 30, juin 1939, puis Bibliothèque Robert von Hirsch, n° 54, juin 1978 (envoi à M. Oscar de Vallée, l’avocat général auprès de la cour d’appel [l’envoi qui avait pâli a été repassé à la plume ultérieurement]).

Sainte-Beuve, critique officiel de Baudelaire, possédait un exemplaire, une brochure apportée par Baudelaire lui-même au grand critique dans l’espoir d’être défendu (cf. Correspondance, t. I, lettre à Sainte-Beuve du mardi 18 août 1857) ; Eugène Crépet, éditeur, possédait un exemplaire (envoi) ; Auguste Poulet-Malassis, éditeur de Baudelaire, possédait un exemplaire (sans envoi).


UNE PROVENANCE IMPORTANTE : Ce très précieux recueil provient des archives de Narcisse ANCELLE (1801-1888), l’ami, le confident et le soutien moral de Mme Caroline Aupick (mère de Baudelaire), notaire et conseil judiciaire de Charles Baudelaire jusqu’à la fin de sa vie. Héritier de Mme Aupick avec Félicité Baudelaire, belle-sœur du poète prodigue, et Louis Emon, ami de la famille Aupick, Narcisse Ancelle fut l’un des hommes qui ont le mieux connu Baudelaire et il communiqua aux Baudelairiens des archives essentielles de l’œuvre inachevée du poète. À sa mort, en 1888, son fils Albert Ancelle recueillit les archives baudelairiennes.

Collection. – Cette pièce était conservée par les héritiers de Maurice ANCELLE et transmis par descendance familiale.


LIEUX D’EXPOSITION

Ce document a été exposé à la Bibliothèque nationale de France, 1957 et au Musée du Petit-Palais à Paris, 1968.

a) – L’exposition monographique Charles Baudelaire a été inaugurée à la Bibliothèque nationale de France, Galerie Mansart, le 19 décembre 1957. Organisée pour commémorer le centième anniversaire des Fleurs du mal, elle a été conçue comme un hommage à l’ensemble de la vie et de l’œuvre de Baudelaire.

Ce précieux document a été présenté sous la notice n° 281 au catalogue général officiel de l’exposition anniversaire Fleurs du Mal.

b) – L’exposition monographique consacrée à Baudelaire, poète et critique d’art, a été inaugurée au Musée du Petit-Palais le 23 novembre 1968. Elle couronnait ainsi « l’année Baudelaire » et illustrait une période de l’histoire de l’art, celle du milieu du XIXe siècle, pendant laquelle Baudelaire déployait les ressources de son intelligence et son génie poétique pour découvrir dans l’art de son temps ce qui pouvait contribuer à exalter l’élégance de la vie.

Ce précieux document a été présenté sous la notice n° 337 au catalogue général officiel de l’exposition Baudelaire critique d’art.


Articles justificatifs réunis par Baudelaire pour sa défense

Factum tiré à 50 exemplaires (cf. Bibliothèque Fernand Vandérem [grand baudelairien], Première Partie, Paris, Giraud-Badin, 1939, n° 100, p. 30) composé par Charles Baudelaire et destiné à ses juges pour sa défense et publié le 15 août 1857. Il réunit quatre articles signés d’Édouard Thierry, publié dans Le Moniteur universel, le 14 juillet 1857, Frédéric Dulamon, publié dans le Présent, le 23 juillet 1857, Jules Barbey d’Aurevilly (non publié) et Charles Asselineau (non publié). Les deux derniers articles avaient été refusés par les périodiques (La Revue française et Le Pays) qui auraient dû les publier, par crainte de s’attirer les foudres de la justice qui avaient déjà grondé en 1852 lors de la publication du Reniement de saint Pierre (poème de Charles Baudelaire).

Baudelaire avait pensé émouvoir ses juges ou les adoucir en leur faisant « hommage » d’une plaquette réunissant quelques-uns de ses poèmes, assortis des commentaires favorables de quelques critiques de l’époque. 

Plus d'un demi-siècle après l’abolition, provisoirement définitive, de la censure par la Révolution Française, le procès des Fleurs du Mal ravive la question de la liberté d’expression.

Mi-août 1857. Publication des articles justificatifs pour Charles Baudelaire. Le 20 août, l’affaire des Fleurs Mal vint à l’audience de la sixième chambre correctionnelle. Le substitut du procureur impérial Ernest Pinard condamne le livre « pour outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs », Baudelaire et ses éditeurs doivent payer de lourdes amendes. Quelques exemplaires subissent l’amputation de six pièces condamnées.

La minute de ce jugement et le dossier de la procédure ont été détruits en 1871 lors de l’incendie du greffe du Palais de justice de Paris. Le lecteur en trouverera la trace dans le numéro du 21 août 1857 de la « Gazette des tribunaux », qui donne le texte du jugement.

Sainte-Beuve

En août 1857, arrive le procès : Baudelaire est en danger. Critique officiel, Sainte-Beuve se trouve en délicate posture pour intervenir. Au moins pourrait-il autoriser Baudelaire, son « jeune ami », à publier sa lettre dans le recueil d’articles adressé aux juges. C'est hors de question. Silence sur l’affaire des Fleurs du Mal. Tout juste si le grand critique donnera quelques extraits de cette lettre trois ans plus tard, en 1860, et il ne la publiera complète que neuf ans après, le poète décédé, en 1869, dans un furtif appendice des Nouveaux Lundis (t. I, p. 400).

Factum : Mémoire juridique en forme de plaidoyer ou pro domo sua pour l’une des parties d’un procès.


BIBLIOGRAPHIE

– Catalogue BnF, Charles Baudelaire, Exposition organisée pour le centenaire des Fleurs du Mal, Paris, 1957, n° 281, p. 65 ; – Catalogue Petit Palais, Baudelaire, Petit Palais, 23  novembre 1968 – 17 mars 1969, Préface de Claude Pichois, Paris, 1968, n° 337, p. 82 ; – Léopold Carteret, Le Trésor du Bibliophile Romantique et Moderne, t. I, p. 126 ; – Fernand Vandérem, Baudelaire et Sainte-Beuve, Nouvelle Édition, Paris, librairie Henri Leclerc, 1917 (une remarquable étude).

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